Oiseaux et papillons paient la facture climatique


Source :

Une étude européenne montre que les et papillons s'adaptent au réchauffement en migrant au nord, mais avec retard.Ils ont beau voler vers le nord, ils vont moins vite que la température. Tel est le principal enseignement d'une étude publiée en ligne, dimanche 8 janvier, par la revue Nature Climate Change. Issue d'une collaboration sans précédent entre sept pays européens (Espagne, Finlande, France, Pays-Bas, République tchèque, Royaume-Uni, Suède), cette étude montre que ces animaux s'adaptent au changement climatique. Mais avec un certain retard. En vingt ans, le thermomètre a grimpé d'un degré en Europe, décalant les températures de 249 km vers le nord. Poussés par la chaleur, nombre d'animaux et de plantes ont suivi le mouvement. A un rythme relativement rapide : publiée dans la revue Science en août 2011, une méta-analyse portant sur plus de 2 000 espèces a ainsi révélé que celles-ci, depuis les années 1970, se déplaçaient vers le nord à la vitesse moyenne de 16,9 km par décennie, ou grimpaient vers des biotopes plus élevés (11 m par décennie). Si l'étude qui sort aujourd'hui n'est pas sans précédent, elle est en revanche la première à quantifier le retard pris sur le climat par les populations animales dans ce " glissement " vers le nord....Fondée sur l'observation, de 1990 à 2008, de 9 490 communautés d' et 2 130 communautés de papillons, cette gigantesque collecte de données a été coordonnée à l'échelle européenne par Chris van Swaay (Dutch Butterfly Conservation de Wageningen, Pays-Bas) pour les papillons, et par Frédéric Jiguet (Muséum national d'histoire naturelle de Paris) pour les . Grâce à elle, on connaît désormais, de manière assez précise, la distribution européenne moyenne des différentes espèces de papillons et d' sur les vingt dernières années."En croisant ces informations avec la carte des températures européennes, on calcule la température moyenne de distribution de chaque espèce, explique Frédéric Jiguet. Supposons ensuite que, sur un de nos sites d'observation, on compte trois mésanges, deux merles, un moineau et cinq pigeons. En se fondant sur la température moyenne de distribution de chacune de ces espèces, et sur les effectifs comptés, on peut alors déterminer "l'affinité thermique moyenne" de cette communauté d'. " Il ne reste plus alors qu'à observer comment cette valeur bouge avec le temps pour constater que, sur un même site de comptage, la composition de la communauté évolue à mesure que le climat se réchauffe. " Ainsi, plus la température monte, plus et papillons migrent vers le nord pour y retrouver le climat qui leur convient le mieux, preuve de leurs capacités d'adaptation. A quelle vitesse ? C'est là que les choses se gâtent. Car si l'on compare leur déplacement au " glissement " de 249 km enregistré sur vingt ans par les températures, on découvre que les animaux sont loin derrière. Les papillons affichent un retard moyen de près de 135 km sur le thermomètre, les de 212 km. A un degré plus ou moins fort, chacun de ces groupes est donc globalement en déséquilibre par rapport à son climat optimal." Les animaux accumulent une "dette" par rapport au climat, qui correspond au retard qu'ils accumulent par rapport au changement des températures de leurs distributions ", commente Vincent Devictor (CNRS de Montpellier), qui a assuré pour la France le suivi de cette étude. Une dette dont les espèces, d'une manière ou d'une autre, devront s'acquitter. " Soit elles s'adapteront aux nouvelles conditions climatiques, soit elles continueront de monter vers le nord, soit elles paieront le prix fort en subissant des dommages démographiques. Mais dans tous les cas, il y aura un coût à payer ", précise le chercheur. Avec un facteur de perturbation supplémentaire, dû aux différentes vitesses de migration observées entre espèces.Pourquoi les lépidoptères - exception faite de la Catalogne, où ils auraient plutôt tendance, pour des raisons d'aménagement agricole, à descendre vers le sud -, sont-ils plus véloces à retrouver la fraîcheur nordique que les ? " En tant qu'espèces ectothermes - espèce dont la chaleur corporelle provient du milieu extérieur - , les papillons sont sans doute plus sensibles que les aux variations de température. Et ils se reproduisent à raison de plusieurs générations par an, ce qui favorise une évolution plus rapide ", propose Frédéric Jiguet. Quoi qu'il en soit, la dette n'est pas la même pour tous. Et ces deux groupes animaux étant liés dans une même chaîne alimentaire (les mangent les chenilles), leur décalage d'adaptation produira vraisemblablement divers bouleversements dans les écosystèmes. Illustrant combien les changements climatiques réorganisent rapidement et profondément la composition de la en Europe, ces données constituent donc un précieux indicateur d'impact du changement climatique sur la biodiversité. Lorsqu'elles seront étendues à d'autres espèces - notamment aux plantes -, elles devraient également fournir des éléments de réflexion à tous les gestionnaires des espaces protégés, dont la mission future ne peut désormais plus être conçue sans tenir compte de l'évolution du climat.Auteur : Violaine FichefetMis en ligne le 12/01/2012



 
Modèle several3 par Net-Tec Internet Solutions Adapté pour ViaBloga par Alexandre Fontenaille.